Otite externe : peut-on la prévenir ?

Vous souffrez probablement d’une otite externe, une infection de l’oreille externe également appelée « oreille du nageur ». Comme le nom l’indique, cette affection survient généralement chez les personnes qui nagent beaucoup, comme c’est le cas des plongeurs qui prennent des vacances de plongée intensive.

Cause
Malgré ce que pensent de nombreuses personnes, l’otite externe n’est pas causée par une bactérie qui se développe dans l’eau. L’agent responsable de l’otite externe est une bactérie qui se trouve généralement dans votre propre conduit auditif externe. Il s’agit d’une bactérie inoffensive, mais qui peut causer des problèmes dans certaines conditions. Lors d’immersions fréquentes, l’eau fait gonfler les cellules qui tapissent le conduit auditif externe. Après un certain temps, ces cellules peuvent s’écarter suffisamment pour laisser pénétrer les bactéries qui se trouvent habituellement à la surface du conduit auditif. Sous la peau, ses bactéries se trouvent dans un environnement chaud et humide, propice à leur développement et à leur multiplication.
 

C’est à ce moment-là que vous commencez à ressentir des démangeaisons, qui peuvent évoluer vers l’apparition de douleurs et d’une inflammation. En l’absence d’un traitement approprié, le gonflement du conduit auditif peut se propager aux ganglions lymphatiques avoisinants. La douleur peut alors devenir si aigüe que le simple fait de bouger les mâchoires peut faire mal. Cette évolution des symptômes peut se produire en l’espace de deux jours seulement, bien que cela varie d’un individu à l’autre. À ce stade, la prise d’antibiotiques est inévitable, et toute activité de plongée est exclue.

Un peu d’histoire
Plusieurs membres du personnel DAN ont déjà souffert d’une otite externe, y compris le Dr Edward D. Thalmann, ancien assistant-directeur médical chez DAN et capitaine retraité du corps médical de la Marine américaine. « Lorsque j’ai rejoint la Marine en 1972, on m’a demandé d’examiner le problème des infections auriculaires chez les plongeurs à saturation », explique le Dr Thalmann. « Ces plongeurs passent jusqu’à un mois d’affilée dans des caissons de plongée à bord d’embarcations, où ils sont maintenus à la même pression que celle à laquelle ils effectuent leur travail sous l’eau, qu’il s’agisse de récupérer une épave ou de rechercher des objets. Chaque jour, ces plongeurs sont transférés de leur caisson vers le site de travail au sein d’une cloche de plongée. Ils passent énormément de temps immergés. Le caisson et la cloche de plongée constituent tous deux un environnement chaud et humide, idéal à la dissociation de la paroi cellulaire du conduit auditif, qui se traduit souvent par le développement d’une otite externe. »

Prévention
« L’incidence d’otite était si élevée au moment où j’ai rejoint la Marine que l’on s’attendait à ce que 20 % de tous les plongeurs à saturation la contractent », poursuit M. Thalmann. Il s’est donc penché sur le problème. « J’ai parcouru la littérature médicale et trouvé un article qui contenait la réponse. Lors d’un camp d’été, des instructeurs avaient découvert que l’introduction de quelques gouttes d’une solution déshydratante dans l’oreille au début et à la fin de chaque journée éliminait presque totalement l’incidence d’otite externe chez leurs jeunes recrues. »

Cette solution apparemment simple comportait toutefois un désavantage : les gouttes devaient rester cinq minutes entières dans chaque conduit auditif. Si cette partie du traitement n’était pas respectée, l’infection auriculaire réapparaissait. Le Dr Thalmann s’est ensuite penché sur une approche similaire applicable à ses plongeurs. « Pour soigner les plongeurs de la Marine, j’ai décidé d’utiliser une solution de Domeboro Otic®, composée de : 2% d’acide acétique, de l’eau, de l’acétate d’aluminium, de l’acétate de sodium et de l’acide borique. L’acide retarde le développement des bactéries, tandis que l’acétate d’aluminium et de sodium agissent en tant qu’astringent en éliminant l’excès d’eau des cellules tapissant la paroi du conduit auditif. Nous avons demandé aux plongeurs de mettre cette solution dans leurs oreilles deux fois par jour en veillant à la maintenir 5 minutes dans chaque oreille (la durée était chronométrée depuis l’extérieur du caisson). » Résultat : le problème de l’otite externe a disparu parmi les plongeurs à saturation de la Marine, et la prophylaxie décrite ci-dessus pour l’oreille externe fait toujours partie des procédures de plongée à saturation standard de la Marine américaine à ce jour. Il s’agit également d’une mesure préventive efficace pour les plongeurs de loisir qui plongent de manière intensive, plusieurs jours consécutifs.

Utilisation de la solution
Le seul problème pour les plongeurs de loisir est que la solution Domeboro Otic est disponible sous prescription uniquement, et ne peut être obtenue qu’après une visite chez le médecin. Demandez à votre médecin s’il peut vous recommander des produits similaires, il existe d’autres préparations disponibles sans ordonnance et moins chères. Ces solutions comprennent généralement 95 % d’alcool isopropylique et de la glycérine anhydre. Ce type de préparation extraie sans problème l’excès d’eau des cellules, mais l’absence d’acidité les rend moins efficace en termes d’inhibition de la croissance bactérienne.

Néanmoins, aucune de ces préparations sans ordonnance n’a été testée dans le cadre de la plongée, donc on ne sait pas si elles agiront aussi bien que le Domeboro Otic. Quelle que soit la préparation pour laquelle vous optiez, tout l’art consiste à l’appliquer correctement. La solution doit être appliquée selon les indications au début et à la fin de chaque journée de plongée (avant la première plongée et après la dernière). Souvenez-vous qu’il s’agit d’un traitement prophylactique qui doit être débuté avant que les oreilles ne s’infectent. Le traitement n’est pas efficace si une infection est déjà présente. Et un avertissement : n’insérez pas de gouttes dans vos oreilles si vous avez des raisons de soupçonner une rupture de la membrane tympanique suite à un barotraumatisme. Les gouttes risqueraient en effet d’entraîner les bactéries dans l’oreille moyenne, où le développement d’une infection exigerait la prise d’antibiotiques.

Éliminer le surplus de cérumen
Si vous plongez régulièrement sur une longue période de temps, il peut se produire une accumulation de cérumen dans vos oreilles, provoquant le blocage du conduit auditif externe. Le plongeur risque alors de rencontrer des difficultés d’équilibrage de ses oreilles et pourrait développer une infection plus facilement. Si vous pensez que votre conduit auditif est bouché, demandez à quelqu’un de vous examiner à l’aide d’un otoscope. Si le tympan n’est pas visible, vous devrez éliminer le surplus de cérumen, mais sans utiliser de cotons-tiges ou d’autres objets. Nettoyez l’oreille en aspergeant le conduit d’eau chaude lorsque vous prenez  une douche. Vous pouvez également utiliser du  peroxyde d’hydrogène. Il existe en outre des solutions sans ordonnance destinées à l’élimination du cérumen. Si aucune de ces méthodes ne fonctionne pour vous, consultez un médecin pour qu’il supprime le bouchon de cérumen. En effet, toute intrusion dans le conduit auditif doit être effectuée exclusivement par une personne qualifiée.
 

En tant que mesure préventive, vous pouvez asperger votre conduit auditif sous la douche. Formez un entonnoir à l’aide de vos mains autour de vos oreilles et laissez-les se remplir d’eau. Vous créerez ainsi une circulation d’eau dans le conduit auditif. Évitez toutefois de diriger le jet de la douche directement dans les oreilles, au risque de blesser le tympan et d’altérer votre audition. * Le Dr Thalmann est décédé en 2004, mais bon nombre de ses travaux résistent à l’épreuve du temps. Pourquoi Domeboro Otic® ? Remise en contexte Dans le cadre de cet article sur l’otite externe, nous avons mentionné le Domeboro Otic simplement parce qu’il s’agit de la seule solution testée par la Marine américaine. Il existe toutefois d’autres solutions efficaces et moins chères. Demandez conseil à votre pharmacien. Lorsque la Marine s’est attaquée au problème de l’otite externe chez les plongeurs à saturation, elle ne voulait pas d’un « remède fait maison ». Elle voulait un remède préemballé, prêt à l’emploi, disponible immédiatement, facile à utiliser et efficace. Domeboro Otic remplissait toutes ces conditions. Et son coût d’un dollar américain par jour pour la prévention d’infections auriculaires susceptibles de compromettre la mission des plongeurs était insignifiant par rapport aux dizaines de milliers de dollars investis par jour dans de nombreuses plongées à saturation.

Le rapport qui a inspiré le choix de Domeboro Otic dans l’étude de l’otite externe réalisée par la Marine américaine fut rédigé par le Dr Edley H. Jones (Prevention of «Swimming Pool Ear» [Prévention de l’oreille du nageur], Laryngoscope 1971; 81:731-3). Le Dr Jones avait commencé ses observations en 1924 lors d’un camp d’été organisé par la YMCA. Il a découvert qu’une solution saturée d’acide borique dans 90 % d’alcool éthylique prévenait l’oreille du nageur car la solution séchait rapidement les conduits auditifs humides. Au cours des 10 années qui ont suivi, il a essayé d’autres solutions et a découvert que 75 % d’alcool isopropylique fonctionnait tout aussi bien. En 1938, quelqu’un l’a contacté pour l’informer que cette solution ne produisait plus d’effet.

Après examen, le Dr Jones a toutefois constaté que cette personne n’avait pas laissé la solution dans le conduit auditif suffisamment longtemps pour lui laisser le temps d’agir et de déshydrater les cellules du conduit. Plus tard, en 1961, le Dr Jones a rapporté qu’une dose de 5 % d’acide acétique permettait de venir à bout de toutes les bactéries qui se trouvent habituellement dans le conduit auditif. Considérant qu’il pouvait s’agir d’un moyen efficace pour prévenir l’oreille du plongeur, il a mélangé une solution de 5 % d’acide acétique dans différents volumes d’alcool isopropylique en vue de réaliser des essais lors du camp. Il a découvert que  5 % d’acide acétique mélangé à 85 % d’alcool isopropylique était ce qui fonctionnait le mieux. L’ajout d’un astringent (2 % d’huile Alpha Keri®) n’avait aucun effet et l’ajout de 10 % de propylène glycol (un autre astringent) provoquait la mue des cellules tapissant le conduit auditif, ce qui était un effet indésirable.
 

D’autres publications médicales ont indiqué que le pH acide constituait l’élément le plus important des solutions utilisées pour soigner l’otite externe. Il a été découvert qu’une solution de 2 % d’acide acétique, dont le pH est de 3, faisait baisser le pH du conduit auditif à 4-5 : un taux bactéricide pour les bactéries que l’on trouve habituellement dans le conduit auditif. La Marine américaine a sélectionné Domeboro Otic pour son étude car cette solution contient les 2 % d’acide acétique nécessaires à obtenir le bon pH dans le conduit auditif, ainsi que des agents déshydratants. Fabriquez votre propre remède « fait maison. » Où tout cela nous mène-t-il ? Vous pouvez préparer votre propre remède maison pour prévenir l’infection des oreilles, comme de nombreux membres DAN nous ont indiqué qu’ils le faisaient. Du vinaigre de vin blanc contient 4 à 6 % d’acide acétique. Mélangé avec une proportion égale d’alcool isoprophylique, vous devriez probablement obtenir une solution qui fonctionne bien. Par contre, du vinaigre non dilué pourrait s’avérer trop acide et provoquer une irritation.
 

Vous pourriez utiliser une quantité moindre d’alcool si une proportion 50/50 vous assèche de trop les oreilles. Un dessèchement trop important peut en effet provoquer des douleurs au bout de quelques jours. En principe, un mélange de 50 % d’acide acétique et de 50 % d’eau devrait bien fonctionner car l’effet du pH acide semble jouer un rôle plus important que l’effet de dessèchement produit par l’alcool. L’ajout de propylène glycol ou d’autres astringents dans un remède maison semblerait inutile ou produire des effets indésirables selon les observations du Dr Jones. Terence M. Davidson, M.D., le directeur de la clinique des dysfonctionnements nasaux de l’Université de Californie, San Diego, aux États-Unis, recommande un autre mélange contenant de l’acide acétique (du vinaigre), composé d’une part d’eau, d’une part de vinaigre blanc de table (environ 5 % d’acide acétique) et d’une part d’alcool à friction (70 % d’alcool isopropylique).
 

« Ce mélange fonctionne bien, mais sent fort le vinaigre, raison pour laquelle les gens préfèrent le Domeboro Otic », constate-t-il. Une autre alternative consiste à utiliser une solution de Burrow (Bu-ro-Sol®) ou des comprimés de Burrow, qui sont en vente libre (disponibles sans ordonnance). Vous pouvez préparer une solution de Domeboro Otic en mélangeant une part de solution de Burrow, une part d’eau et une part d’alcool isopropylique, a constaté le Dr Davidson. À la place du vinaigre, pourrait-on utiliser du jus de citron, qui contient de l’acide citrique et non de l’acide acétique, comme l’ont suggéré certains de nos membres ?

En principe, une solution offrant un pH de 3 pourrait fonctionner, mais on ne sait pas si d’autres substances contenues dans le jus de citron pourraient ou non favoriser la croissance bactérienne. Si vous voulez utiliser un remède maison, nous vous conseillons donc de vous en tenir à ce que l’on sait efficace : du vinaigre et de l’alcool isopropylique. Et souvenez-vous, quelle que soit la solution utilisée, son efficacité sera considérablement réduite si vous la laissez moins de cinq minutes dans le conduit auditif. Autre avertissement : Les solutions décrites dans cet article sont destinées à un usage dans des oreilles en bonne santé, dont le tympan est intact. En cas de soupçon de déchirure du tympan, ces solutions ne doivent pas être utilisées car elles pourraient endommager les structures de l’oreille moyenne. Si la solution provoque des irritations, il faut arrêter de l’utiliser.

Utilisation de la solution Domeboro
Otic La Marine américaine recommande la procédure suivante:

  1.  Pencher la tête sur le côté et remplir délicatement le conduit auditif externe de la solution.
  2.  Laisser la solution dans le conduit auditif pendant cinq minutes complètes. 
  3. Pencher ensuite la tête de l’autre côté pour permettre à la solution de s’écouler. 
  4. Répéter cette procédure dans l’autre oreille.

Pour des résultats optimaux, chronométrer les cinq minutes de traitement à l’aide d’une montre. Si la solution est laissée moins longtemps dans l’oreille, son efficacité sera considérablement réduite.

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