MDD neurologique

Le plongeur
Il s’agit d’une monitrice de plongée de 27 ans, brevetée depuis quatre ans. Cette plongeuse technique a effectué plus de 250 plongées depuis l’obtention de son brevet. Elle a indiqué qu’elle prenait des anxiolytiques. Elle n’avait pas d’antécédents médicaux et jouissait d’une bonne santé physique. Pendant la plongée en question, elle réalisait son premier exercice de palier de décompression.

La plongée
Selon son plan de plongée, elle devait effectuer cette première plongée technique à une profondeur de 46 mètres, pendant une durée de 20 minutes, en respirant de l’air délivré au moyen d’un scaphandre à circuit ouvert. Elle portait une combinaison étanche afin de bénéficier d’une meilleure protection thermique et utilisait un gilet de stabilisation. Elle avait déjà effectué plus de vingt plongées en combinaison étanche auparavant, à des profondeurs variant entre 6 et 18 mètres. Elle s’est aidée de tables de plongée pour planifier la pongée (et les imprévus), mais a utilisé un ordinateur pendant son immersion. Deux apprentis, un moniteur et un assistant ont également plongé.
 

Une fois arrivée à la profondeur prévue, la plongeuse a entamé ses exercices, qui consistaient en trois fermetures de robinets suivies d’une longueur de nage sans masque. La visibilité était limitée, la plongeuse avait froid et sa combinaison a rapidement commencé à la serrer, accentuant son inconfort. Elle a effectué tous les exercices requis, mais sous les effets d’une narcose : outre son sentiment général d’anxiété, elle avait une vision en tunnel, ses pensées étaient ralenties et les objets qu’elle voyait avaient une teinte orangée.

La remontée et les paliers ont duré environ une heure au total. Pendant les paliers, les plongeurs ont utilisé des mélanges respiratoires comportant des pressions partielles d’oxygène plus élevées et ont respiré de l’oxygène pur lors du dernier palier (à 6 mètres). Malgré les difficultés rencontrées en profondeur, la plongeuse a déclaré que la plongée s’était déroulée selon les plans. L’instructeur a confirmé la réussite de ses exercices. Personne d’autre parmi les plongeurs présents ne s’est plaint de narcose ou d’autres problèmes. Après sa sortie de l’eau, la plongeuse a remarqué que sa peau présentait des marques provoquées par l’effet de ventouse de sa combinaison. En voyant ces marques, elle s’est rendu compte qu’elle n’avait pas suffisamment gonflé sa combinaison pendant la plongée. Selon elle, les effets de la narcose étaient trop importants pour qu’elle s’aperçoive de l’effet de ventouse. Elle n’a toutefois rencontré aucun problème de flottabilité pendant la plongée.

Les complications
Environ une heure après la plongée, elle a ressenti une douleur aigüe dans sa main droite, accompagnée d’un léger engourdissement et de picotements. Vingt minutes plus tard, une douleur lancinante, de type crampe, est apparue dans son poignet et son coude droits. Elle a décrit ses symptômes à l’un des instructeurs présents, qui lui a administré les premiers soins avec oxygène. Elle a respiré de l’oxygène pur au moyen d’un détendeur à la demande. Au cours des 30 minutes qui ont suivi, son épaule droite a commencé à lui faire mal et des démangeaisons se sont généralisées au niveau du torse et sous les bras. Sont ensuite apparues des rougeurs et de marbrures irrégulières à l’arrière des épaules, sur l’abdomen et au niveau de la jambe et du bras droits. Elle a également signalé une sensation de fatigue extrême et de forte nausée.

Diagnostic et traitement
Après avoir respiré de l’oxygène, qui a entraîné une légère atténuation de ses symptômes, la plongeuse a été transportée vers l’hôpital le plus proche, où un premier examen a permis de constater sa fatigue extrême et ses vertiges. Elle a ensuite été transférée vers un second hôpital équipé d’un caisson de recompression destiné au traitement des plongeurs. Les traitements en caisson ont débuté cinq heures après l’apparition des premiers symptômes.
 

Au terme de la première session de recompression, ses symptômes cutanés se sont atténués, mais elle avait besoin d’aide pour se lever et marcher. Elle a reçu un traitement selon la table de traitement 6 de la Marine américaine, qui a donné de bons résultats : ses douleurs, démangeaisons, engourdissements et rougeurs ont fini par disparaître.
Le jour suivant, des douleurs musculaires et articulaires ayant réapparu, elle s’est rendue au centre médical et hyperbare local pour un deuxième examen. Elle a signalé l’apparition de vertiges et le personnel médical a noté un léger trouble de l’équilibre et de la locomotion.

Elle a reçu un deuxième traitement selon la table 6 de la Marine américaine, qui a eu comme résultat une légère baisse des vertiges et des douleurs. Les symptômes se sont progressivement résorbés jusqu’à disparaître au cours des trois semaines qui ont suivi. Deux mois plus tard, la plongeuse a repris ses entraînements en piscine, mais a attendu quatre mois avant d’oser une nouvelle plongée profonde. Elle n’a connu aucune recrudescence de ses symptômes depuis la reprise de la plongée.

La discussion
L’apparition de symptômes peu de temps après une plongée est toujours suspecte, en particulier s’il s’agit de symptômes inhabituels ou nouveaux. Les MDD cutanées, caractérisées par des rougeurs, des marbrures ou des boursouflures (« moutons ») sont rares. Dans les rapports de DAN, ces affections sont plutôt associées aux plongées en eau froide. Selon le rapport annuel de DAN sur la pathologie de décompression, les accidents mortels en plongée et l’étude Project Dive Exploration, la plupart des symptômes de MDD se développent dans les trois premières heures suivant une plongée. L’apparition précoce et l’évolution progressive de ces symptômes sont généralement des signes de MDD grave, difficile à soigner. Même s’ils étaient surpris par les symptômes inattendus développés par la plongeuse accidentée, les plongeurs qualifiés qui l’accompagnaient ont immédiatement entamé les premiers soins avec oxygène et organisé le transport jusqu’à l’hôpital le plus proche. Cette précocité du traitement a certainement joué un rôle important dans la disparition progressive, mais complète, des symptômes.
 

Un autre aspect important dans ce cas a été la rapidité du transfert de la plongeuse vers un établissement à même d’effectuer un examen et de fournir un traitement adéquat pour la MDD. Contacter sans attendre un centre médical local était une sage décision. Même si ce centre n’était pas en mesure de prendre en charge les plongeurs, il pouvait, comme tout hôpital, réaliser un examen neurologique, administrer des solutés par voie intraveineuse, fournir de l’oxygène et, si nécessaire, réaliser un suivi médical pendant le transport. Le personnel médical de cet établissement a pu stabiliser l’état de la plongeuse et déterminer la nécessité d’une recompression.

Les symptômes de MDD peuvent fluctuer avant et après le traitement. En outre, un seul traitement ne suffit pas toujours à les faire disparaître, en particulier dans des cas comme celui-ci, caractérisés par une évolution progressive des symptômes depuis de simples douleurs musculaires ou articulaires, jusqu’à une fatigue générale et des troubles de la locomotion. En cas de doute ou de question, il ne faut jamais hésiter à appeler ou rappeler le médecin traitant ou DAN. La reconnaissance des symptômes, l’administration des premiers soins avec oxygène, la réalisation d’un examen médical et la fourniture d’un traitement sont autant d’aspects qui composent le tableau global de la réponse à la MDD.

Un mot de la plongeuse
Cette expérience m’a rappelé l’importance qu’il convient d’accorder aux détails. En y repensant, je n’étais probablement pas suffisamment à l’aise avec ma combinaison étanche pendant cette plongée. Je n’ai pas pesé l’importance de l’effet de ventouse, qui peut inhiber la circulation et accroître l’inconfort durant la plongée. L’effet de ventouse et le froid extrême ont peut-être contribué à l’apparition de rougeurs et au développement de la MDD cutanée. En outre, je savais que je souffrais d’une narcose grave. J’aurais dû me montrer plus prudente en allongeant la durée de mes paliers de décompression puisque la plongée avait été relativement stressante pour moi. En conclusion, je dois dire qu’il s’agit probablement de la meilleure expérience de plongée que je n’aie jamais vécue. Bien sûr, je ne la souhaite à personne, mais elle m’a permis de mieux me rendre compte de l’importance des différents aspects de la plongée et des façons de réduire les facteurs favorisants de la MDD, en particulier lors d’une plongée technique. J’apprécie toujours autant la plongée, mais à présent, lorsque je plonge, j’essaye de réfléchir à toutes les situations potentiellement à risque et de les anticiper.

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