La théorie mise en pratique – Remontées d’urgence : gestion des risques
Une remontée d’urgence est le dernier recours face à un incident ou à une menace perçue en plongée. Les plongeurs sont formés à la réalisation de procédures de remontée d’urgence standard qui, lorsqu’elles sont mises en œuvre correctement, minimisent les dangers. Toutefois, rares sont ceux qui s’entraînent à la pratique de ces techniques. Par conséquent, en cas de crise, le plongeur se retrouve devant un danger de lésion, voire de mort.
Les chiffres
Une récente menée par DAN sur 964 décès en plongée a montré qu’une remontée d’urgence intervenait dans 30 % des cas, 288 pour être exact. Dans 189 de ces remontées d’urgence, une remontée rapide (supérieure à 18 m/min) était constatée ou enregistrée. Dans 10 % de ces remontées d’urgence, le plongeur a fait une tentative de remontée libre, c’est-à-dire sans utiliser de source d’air. Dans 8 % des remontées d’urgence mortelles, il y a eu passage d’embout. Dans les autres cas, le mode de remontée d’urgence n’était pas spécifié.
Tomber à court de gaz respiratoire pendant la plongée (une situation entièrement prévisible) constitue l’élément déclencheur le plus fréquent d’une remontée d’urgence. Pour en savoir plus sur ce sujet, reportez-vous à l’article La sécurité en plongée : cela n’arrive pas par accident (AlertDiver.eu, 2014; 52).
La cause la plus commune de décès lors des remontées d’urgence est l’embolie gazeuse artérielle, qui se produit dans 54 % des cas, suivie de la noyade (18 %), d’un problème cardiaque aigu (7 %) et enfin d’une maladie de décompression (5 %). L’embolie gazeuse artérielle s’accompagne de symptômes similaires à ceux d’un accident vasculaire cérébral : le plongeur ressent une faiblesse soudaine et perd généralement conscience dans les minutes qui suivent la remontée à la surface. La perte de conscience se produit souvent avant la sortie de l’eau ou juste après.
Gestion des risques
En tant que plongeurs, nous apprenons à ne jamais retenir notre respiration sous l’eau. Malheureusement, dans une situation d’urgence, les plongeurs oublient vite cette règle et sa raison d’être. Lorsque le plongeur remonte, la pression environnante baisse et l’air contenu dans ses poumons se dilate. Si le plongeur respire normalement, ceci n’est pas un problème : le gaz en expansion s’échappe lors de chaque expiration. Mais si la remontée est trop rapide ou si le plongeur retient sa respiration en remontant, le gaz en expansion ne peut s’échapper. N’ayant aucune autre porte de sortie, le gaz peut littéralement déchirer le poumon du plongeur et s’écouler dans l’organisme. Les lésions dites de « surpression pulmonaire » comprennent l’emphysème médiastinal (l’air se répand dans l’espace entre les poumons), l’emphysème sous-cutané (l’air se répand sous la peau) et le pneumothorax (collapsus pulmonaire). La situation devient particulièrement dangereuse lorsque le gaz s’introduit dans la circulation artérielle. À partir de là, plus rien ne l’empêche d’atteindre directement le cerveau, de former un embole et de bloquer la circulation sanguine.
Lors d’une remontée d’urgence, le plongeur peut oublier ce qu’il a appris dans le cadre de sa formation ou craindre d’expirer de peur de manquer d’air avant d’atteindre la surface. Cependant, lors de remontées depuis les profondeurs pratiquées en plongée récréative, l’air en expansion dans les poumons d’un plongeur est généralement plus que suffisant pour le maintenir jusqu’au bout. Il est très rare qu’un plongeur se noie avant d’atteindre la surface.
Rappel de la formation de plongée
Alors comment peut-on gérer les remontées d’urgence et le risque de lésion ? Comme pour toute urgence en plongée, la meilleure façon de les gérer est de les éviter. Comment ? En maintenant les techniques apprises à jour et en s’y exerçant régulièrement. En planifiant chaque plongée minutieusement, et en refaisant surface avec une réserve d’air. En suivant le plan de plongée. Et, bien sûr, en se souvenant de surveiller de près sa consommation d’air.
Supposons qu’un plongeur fait tout ce qu’il faut et se retrouve tout de même dans une situation requérant une remontée d’urgence. Quelle est la meilleure façon de procéder ?
Tout d’abord, éviter de céder à la panique. Tous les plongeurs sont formés à la réalisation de remontées d’urgence. Voici pour rappel les différentes réactions possibles, par ordre de préférence :
- Réaliser une remontée contrôlée normale, avec le détendeur en bouche.
- Trouver le compagnon de plongée et obtenir sa source d’air de secours (ou sa source principale si le compagnon prend le détendeur de secours, en fonction de la configuration de son matériel). Dans ce scénario, l’objectif est que les deux plongeurs bénéficient d’une source d’air continue afin de pouvoir effectuer une remontée lente et contrôlée jusqu’à la surface.
- Si aucun compagnon de plongée ne se trouve à proximité, ou si le compagnon est également à court d‘air, réaliser une remontée d’urgence contrôlée, seul. Mais à nouveau, éviter de paniquer. L’air contenu dans les poumons à ce stade est généralement suffisant pour permettre au plongeur de remonter jusqu’à la surface. Suivre les procédures apprises en formation : garder le détendeur en bouche à tout moment, il arrive en effet que l’air en expansion permette de réaliser une inspiration rapide supplémentaire. Expirer lentement et de façon continue sur toute la remontée jusqu’à la surface, en limitant la vitesse de remontée.
Comme toutes les autres techniques de plongée, les remontées d’urgence doivent être pratiquées régulièrement. Ne pas hésiter à se rendre à la piscine avec son compagnon de plongée pour se refamiliariser avec l’utilisation du détendeur de secours et les remontées d’urgence en nageant à l’horizontale dans la piscine.
Les remontées d’urgence sont une réponse à une situation susceptible de mettre la vie d’un plongeur en péril sous l’eau. Malgré l’urgence des circonstances qui les entourent, grâce à une formation, à une pratique et à une préparation adéquates, elles devraient constituer une solution sûre pour tout plongeur.