Retour aux principes fondamentaux

La maladie de décompression (maladie dysbarique) est une atteinte fascinante qui se dégage des méandres de la pensée des plongeurs en nous rappelant que nous sommes vulnérables et que notre volonté de dépasser nos limites est contrebalancée par les conséquences potentielles. Que nous remontions des profondeurs ou que nous voyagions vers les hautes altitudes, lorsque nous nous déplaçons vers l’extérieur et vers le haut du centre de la terre, la pression ambiante diminue. Dans des circonstances précises, cette situation peut engendrer des interactions complexes entre physique et physiologie qui peuvent conduire à une atteinte.

Les plongeurs font face à deux types d’atteintes dues à la décompression: l'accident de décompression (ADD ou DCS pour decompression sickness) et l’embolie gazeuse artérielle (EGA ou AGE pour arterial gas embolism). Collectivement, ces deux situations sont contenues dans le terme générique de maladie de décompression (MDD ou maladie des caissons, ou DCI pour decompression illness). Leur origine commune procède du processus de décompression, mais leurs causes sous jacentes sont significativement différentes.

EGA

L'EGA est une atteinte invalidante présente dans 29 pour cent des décès en plongée et se trouve fréquemment associée avec une panne d’air (ou de mélange respiratoire), ce qui représente le point de départ de globalement 41 pour cent des accidents de plongée. Les emboles sont en fait ou potentiellement des blocages vasculaires par des agents étrangers. Ils peuvent être composés de gaz, de caillots sanguins, de graisse, de tumeurs, de liquide amniotiques ou de végétations bactériennes. Dans le cas d’EGA chez le plongeur, les emboles sont composés de gaz circulant dans le flux sanguin artériel résultant d’une surpression pulmonaire ou d’un barotraumatisme pulmonaire (une blessure physique du tissu pulmonaire résultant d’un changement de pression). Ces déchirures permettent au gaz de s’échapper des petits sacs des poumons (alvéoles) et de pénétrer dans le flux artériel.

La loi de Boyle-Mariotte – qui déclare que le volume d’une quantité de gaz va augmenter à mesure que la pression ambiante diminue – explique la surpression pulmonaire à la remontée. L’inverse de cette loi est aussi vrai: Le volume d’une quantité de gaz va diminuer à mesure que la pression ambiante augmente à la descente. Les plongeurs subissent le plus haut risque de surpression pulmonaire à faible profondeur. La plus grande différence de pression que les plongeurs puissent expérimenter dans la colonne d’eau (relativement à la pression ambiante en surface) se passe dans les 3 ou 4 premiers mètres.

L’augmentation de volume de gaz au delà du point que les alvéoles peuvent soutenir résulte en un dommage du tissu pulmonaire et permet à l’air emprisonné dans les poumons de s’échapper dans les veines pulmonaires, qui acheminent le sang oxygéné vers le coeur. Lorsque cette situation arrive, l’air qui s’est échappé entre dans le coeur et le traverse jusqu'au cerveau, où des dommages neurologiques peuvent survenir. La vitesse à laquelle ceci peut arriver explique la survenue rapide des symptômes après une plongée – l’EGA peut survenir après quelques minutes.

Le barotraumatisme pulmonaire peut également se manifester sous forme d’air libre dans le médiastin (une cavité dans la cage thoracique située entre les poumons). Le plus grand danger pour les plongeurs est une EGA qui atteindrait le cerveau, une atteinte connue sous le nom embolie gazeuse de l'artère cérébrale (EGAC ou CAGE, cerebral arterial gas embolism)

Les symptômes d'EGAC se manifestent à la surface ou proche de la surface après une plongée et, approximativement 50 pour cent des plongeurs souffrant d'EGAC subissent une perte de conscience soudaine. D’autres peuvent présenter des altération aigues de leur état mental ou une perte de coordination et de force, qui sont des signes et symptômes d’accident vasculaire cérébral et résultent d’une restriction de la vascularisation dans certaines régions du cerveau. Les individus qui survivent à l’atteinte initiale peuvent récupérer dans les minutes qui suivent, montrer des degrés divers d’atteinte cérébrale ou même récupérer une fonction normale.

En dépit d’une normalité apparente, toutes les victimes de barotraumatismes pulmonaires, EGA ou EGAC doivent être examinés d'urgence à l’hôpital. Les récidives des symptômes neurologiques sont connues pour exister chez des patients présentant une récupération totale apparente. Le consensus actuel des médecins hyperbaristes est que toute personne montrant des signes d’atteinte neurologique après une plongée doit être médicalement évaluée. Les personnes souffrant d'EGA devraient recevoir un traitement à l’oxygène hyperbare (traitement en chambre hyperbare).

Des scanners cérébraux font souvent partie de l’évaluation initiale des ces patients lorsqu’ils entrent aux urgences. Il est important d’évaluer l’existence de lésions cérébrales ou d’accident vasculaire cérébral avant d’entamer le traitement hyperbare – non pas parce l’oxygène hyperbare va aggraver la situation mais plutôt parce qu'un saignement dans le cerveau nécessite une intervention chirurgicale immédiate. Eliminer les saignements intracrâniens et les caillots de sang, qui peuvent aussi causer des atteintes neurologiques aiguës, est une étape importante; l’absence de ces facteurs plaide en faveur du diagnostique d’une EGA due à la plongée et pour l’usage de l’oxygénothérapie hyperbare.

ADD: problèmes de bulles

L'accident de décompression (ADD) est associée à l’absorption de gaz inerte (azote ou hélium) dans les tissus avec une remontée pour réduire la pression ambiante. Dans ce cas, l’élimination de gaz peut amener la formation de bulles. Ceci provoque une inflammation et des traumatismes tissulaires.

Les lois de Boyle-Mariotte, Henry et Dalton sont primordiales à la compréhension de cette maladie. La loi de Boyle-Mariotte explique pourquoi nous devons inhaler progressivement un plus grand nombre de molécules de gaz lors de chaque respiration durant la descente sous l'eau pour que notre corps maintienne une pression dans notre poitrine égale à celle du milieu ambiant. L'augmentation du nombre de molécules de gaz dans nos poumons par rapport à ceux dans notre sang et nos tissus crée un gradient de diffusion, qui, selon la loi de Henry, entraîne les molécules de gaz dans la solution. Parmi ces molécules que nous absorbons, combien et lesquelles sont définies par la loi de Dalton et sont également influencée par des différences dans le flux sanguin vers les différentes parties de notre corps.

Plus la plongée est profonde et longue, plus la quantité de gaz absorbés sera importante. Lorsque des quantités suffisantes de gaz inerte désaturent et forment des bulles durant la remontée, des réactions inflammatoires et vasculaires localisées et systémiques peuvent se développer, amenant potentiellement une grande variété de manifestations cliniques. Contrairement à l’EGA, dans l'ADD les bulles existent d’abord dans le réseau veineux et parmi les tissus, et les symptômes peuvent ne pas apparaître pendant des heures.

L'ADD est en relation avec une sursaturation de gaz inerte (stress décompressif) et la présence de bulles circulantes. Même si de hauts degrés (grades) de bulles (évalués par ultrasons) ne sont pas un diagnostic d’accident de décompression, ils indiquent un stress décompressif considérable et peuvent être plus significativement associés à l’occurrence de symptômes d’accident de décompression que les grades moins élevés. Le délai d’apparition des symptômes est généralement corrélé avec la charge de gaz inerte: une charge majeure est corrélée à une apparition précoce et une progression plus rapide des symptômes. Un aspect fascinant de l'ADD est le fait que le début des symptômes arrive souvent bien après que les bulles ne puissent être détectées. A nouveau, même si la détection de bulles est un indicateur de stress décompressif, ce n’est pas un critère diagnostique.

La recherche actuelle sur l'ADD vise à déceler des marqueurs biologiques qui pourraient se détecter dans le sang. Les chercheurs explorent la corrélation possible entre le stress décompressif et la présence de microparticules membranaires (des vésicules accrochées à la membrane répandues par diverses cellules) dans le sang. Les niveaux de microparticules circulantes varient en fonction des diverses maladies physiologiques mais aussi du stress de frottement provoqué par les bulles circulantes dans le sang. L’hypothèse de travail actuelle est que certaines microparticules (probablement induites par des bulles de gaz inerte) pourraient démarrer, être un marqueur ou bien contribuer à la réaction inflammatoire qui conduits à l'ADD. Cette approche dépasse de loin le simple modèle bullaire. Même s'il est indéniable que les bulles circulantes jouent un rôle certain dans le développement de l'ADD, leur présence ou absence n’en prédit pas valablement la survenue des symptômes. Investiguer ce processus au niveau moléculaire peut nous en apprendre beaucoup sur l'ADD, en augmentant notre perspicacité, et en espérant augmenter l’efficacité de la prévention et du traitement.

Traitement

L’oxygénothérapie hyperbare (OTH) est le traitement de choix pour ADD et EGA. Avant cette thérapie finale, respirer 100 pour cent d’oxygène pur peut accélérer la désaturation de gaz inerte, diminuer la sévérité des symptômes et augmenter l’efficacité du traitement hyperbare.

Le protocole de traitement initial le plus courant et généralement accepté en caisson de recompression est la U.S. Navy Treatment Table 6. En fonction de l’état du patient, ces traitements peuvent être étendus ou répétés. La maladie de décompression est traitée avec la même efficacité dans des caissons multiplaces ou monoplaces. Les caissons monoplaces traitent une personne à la fois, et les patients ne sont pas accompagnés par du personnel médical. Les caissons multiplaces permettent le traitement simultané de plusieurs patients et l’accompagnement médical, ce qui est important dans des cas d’atteintes sérieuses.

Evacuation

Les accidents de plongée peuvent paraître effrayants, et lorsqu'une MDD est suspectée, de nombreux plongeurs n'envisagent pas d’explications alternatives aux symptômes. Afin d’être sûrs que d’autres blessures, maladies et atteintes sévères soient prises en compte, DAN recommande que les plongeurs accidentés recherchent une évaluation médicale auprès de l’hôpital ou dispensaire le plus proche. Si le diagnostique est bien la MDD, le staff médical, et si nécessaire DAN, peuvent entamer une évacuation vers un centre hyperbare approprié et disponible.

Les accidents de plongée induisent de nombreuses questions. Après avoir contacté le service d’urgences médicales local, contactez la hotline d’urgence de DAN au +39 06 4211 5685, ou bien encouragez le centre médical de traitement à le faire. DAN peut fournir des informations médicales pertinentes et prendre part à la planification et la coordination de l’évacuation.

Lois importantes pour comprendre la MDD

Loi de Boyle-Mariotte: À une température constante, le volume d'un gaz donné est inversement proportionnel à la pression ambiante.
Pour maintenir un volume pulmonaire neutre lorsqu'on descend en plongée, on inhale proportionnellement plus de molécules de gaz par respiration.

Loi de Dalton: La pression totale exercée par un mélange gazeux est égale à la somme des pressions partielles des gaz constituants.
Plus nous respirons des molécules de gaz lors de chaque respiration durant la descente, plus l'impact potentiel des pressions partielles élevées devient important. La narcose à l'azote (l'ivresse des profondeurs) résulte d'une pression partielle élevée d'azote.

Loi de Henry: À température constante, la quantité de gaz dissous dans un liquide est directement proportionnelle à la pression partielle qu'exerce ce gaz sur le liquide. En termes physiologiques, cette pression gazeuse existe dans nos poumons en fonction de la pression gazeuse présente dans notre sang.
Plus la pression gazeuse dans nos poumons est importante, plus le gaz va se dissoudre dans notre sang et nos tissus. C'est le principe de l'accident de décompression.

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