Des bulles dans le grand bleu ?
Il est des moments où, en particulier si l’on travaille chez DAN dans le domaine de la recherche, il faut s’arrêter pour réfléchir à certaines situations si l’on veut trouver de nouvelles réponses à des questions importantes.
Les faits
Printemps 2013… nous effectuons une plongée tranquille dans une mer chaude, en respectant tous les paramètres connus. Alors que nous évoluons dans la courbe de sécurité, remontons à la surface sans dépasser la limite de 10 m/min. et réalisons un palier de sécurité, le plongeur commence à sentir une gêne pendant le palier. Une fois hors de l’eau, les symptômes du plongeur sont notables et ce dernier est mis sous oxygène. Heureusement, avec l’aide de DAN, tout rentre dans l’ordre rapidement, si ce n’est qu’une question reste en suspens. Ces symptômes qui se manifestent sous l’eau pourraient-ils être causés par la présence de bulles se formant avant que le plongeur n’atteigne la surface ?
Processus de réflexion
Dans le cadre de nos tests, nous avons identifié la production de bulles « latentes » après la plongée, avec un pic de bulles entre 15 et 60 minutes. Dans de rares cas, des bulles ont été décelées au « moment zéro », qui désigne le moment suivant immédiatement la sortie de l’eau. Mais alors comment est-il possible que le plongeur ait mentionné une gêne à 3 mètres de profondeur pendant le palier de sécurité ?
Le projet
De tels cas nous poussent, en tant que chercheurs, à nous interroger et à promouvoir le développement de projets impliquant l’étude d’une éventuelle « phase gazeuse » survenant lors du retour des plongeurs à la surface.
Il n’est cependant pas si simple d’emporter un appareil Doppler sous l’eau et d’y enregistrer un signal susceptible d’être interprété. En effet, on ne peut pas dire que l’eau et les appareils Doppler soient vraiment compatibles ! À ce point, il nous faut réunir nos esprits et effectuer un exercice de remue-méninges afin de prendre des décisions relatives à notre projet. En collaboration avec nos experts, nous nous penchons sur l’étude d’un prototype de combinaison de plongée nous permettant d’enregistrer des signaux Doppler pendant une plongée. Et deux mois plus tard… nous avons notre premier prototype de « plongeur Doppler ».
Le test
Sous la supervision du professeur Alessandro Marroni, président de DAN Europe, et du docteur Danilo Cialoni, European Research Area Supervisor, nous définissons un protocole de test comprenant des plongées en caisson hyperbare afin de vérifier les performances de l’instrument. Vous vous demandez probablement « mais qu’est-ce que cela a à voir avec un caisson hyperbare ? Il ne contient pas d’eau ! ». C’est tout à fait vrai… mais l’expérience nous permettra de déterminer si une pression d’air élevée peut provoquer une erreur d’instrument : il s’agit là d’un test de résistance très efficace, même davantage que s’il était réalisé sous l’eau !
Un nouveau projet de recherche remplit toujours le cœur d’émotions. Passer un jour après l’autre à développer une étude de faisabilité, puis arriver au moment décisif où l’on se demande : « tout se passera-t-il comme prévu ? »… Durant cette phase, la stratégie mise en œuvre par DAN Europe nous est d’une grande aide : placer une confiance inébranlable en l’équipe et cultiver une passion sous sa forme la plus pure !
Nous contactons le centre hyperbare de Padoue, et nouons une collaboration étroite avec le personnel. Nos essais peuvent commencer: il s’agit de réaliser des plongées à 40 mètres afin de soumettre les plongeurs et les instruments à la pression de test requise.
Pendant cette phase, la combinaison de plongée réagit de façon satisfaisante ; son fonctionnement demeure optimal. Même l’appareil Doppler ne montre aucun signe de défaillance. Les premiers enregistrements réalisés pendant une exposition hyperbare sont parfaits. Nous sommes tous contents des résultats. D’autres essais sont menés afin de trouver les meilleures solutions techniques pour l’enregistrement des signaux Doppler. Après la plongée vient la salle de contrôle, planifiée conformément à la table de plongée, avec grande précision grâce aux instruments du caisson hyperbare.
La première phase du projet s’achève sur une note positive. Nous possédons le seul instrument au monde capable d’enregistrer des signaux Doppler pendant une plongée, même si nous devons encore effectuer un test dans l’eau.
La piscine la plus profonde du monde, Y-40, constitue un autre partenaire important pour DAN Europe Research. Cette piscine semble avoir été construite sur mesure pour la recherche.
Le nouvel appareil Doppler arrive à sa dernière phase de test. Grâce à la température agréable de l’eau, le plongeur n’a pas besoin de porter de combinaison humide. Le dispositif d’enregistrement de l’appareil Doppler est donc visible et facilement accessible. Notre nouvel appareil plonge avec nous, atteint les 42 mètres de profondeur, et continue de fonctionner normalement. Il s’agit d’une totale réussite. En veillant à ne pas dépasser la vitesse du flot de bulles s’échappant du détendeur de plongée, nous remontons à la profondeur indiquée dans le test (6 mètres). Nous rallumons le Doppler, puis nos MP3. Le plongeur se place en « position Doppler » et notre rêve se matérialise sous la forme d’une douce musique… le son est clair et audible ! (Regarder la vidéo)
Nous venons de franchir un nouveau petit pas qui nous mène vers les découvertes de demain. À présent, la question est mise sur la table : des bulles se forment-elles durant la phase de remontée des plongeurs vers la surface ? Comme de coutume, DAN Europe fournira une réponse scientifique. Nos experts médicaux se penchent actuellement sur un protocole de recherche afin de pouvoir nous en dire davantage sur les bulles d’ici 2015.
Massimo Pieri
European Research Area Supervisor
Data Collection Coordinator
Un énorme merci à nos volontaires de l’étude : Davide Bastiani, Natasha Bertozzi, Claudio Corsale, Andrea Covelli, Aldo Ferrucci, Gisberto Ianni
Photo par Aldo Ferrucci