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La sécurité en plongée : cela n’arrive pas par accident
Divers Alert Network (DAN) tire une grande fierté de se trouver à vos côtés et de diriger depuis trente ans des recherches visant à améliorer la sécurité de la plongée. Les chercheurs de DAN ont récemment examiné les données accumulées par DAN relatives aux décès en plongée. Ils ont mené une analyse des causes fondamentales de près de 1 000 décès de plongeurs de loisir afin de déterminer les circonstances et événements les ayant précédés. Cette analyse a permis aux chercheurs de DAN d'identifier quatre phases distinctes dans la chaîne d'événements menant à un accident mortel : le facteur déclenchant, l'agent incapacitant, la lésion incapacitante et la cause du décès. En tant que premières causes fondamentales identifiables susceptibles de transformer une plongée en situation d’urgence, les facteurs déclenchants méritent une attention spéciale. Leur identification est essentielle afin que les plongeurs puissent les éviter ou les gérer pendant une plongée.
Dans l’analyse des décès, les facteurs déclenchants suivants ont été identifiés :
- Manquer de gaz respiratoire – 41 %
- Se retrouver coincé – 21 %
- Problèmes liés à l'équipement – 15 %
- Forte houle – 10 %
- Traumatisme – 6 %
- Problème de flottabilité – 4 %
- Gaz inapproprié – 3 %
MANQUER DE GAZ RESPIRATOIRE
Le facteur déclenchant le plus fréquent était le fait de tomber à court de gaz respiratoire. Pour situer ce problème dans son contexte, environ 400 plongeurs parmi les cas étudiés pourraient encore être en vie aujourd’hui s’ils avaient géré leur réserve de gaz respiratoire correctement. En raison de la sophistication de l’équipement utilisé aujourd’hui en plongée, il devrait être impossible de tomber à court de gaz respiratoire sous l’eau, en particulier en l’absence d’autres problèmes préalables.
La clé consiste à rester attentif à sa réserve d'air : toujours s’immerger avec une bouteille de gaz respiratoire pleine et terminer la plongée (c.-à-d. se retrouver sur le bateau, au port ou sur la terre ferme) avec une quantité de gaz restante. Avant de commencer une plongée, la palanquée doit décider de la manière de communiquer les informations relatives à la réserve d’air sous l’eau. Elle doit en outre établir à quel moment entamer la remontée et terminer la plongée, par exemple lorsque le premier plongeur atteint la moitié de sa réserve, voire avant.
De nombreux plongeurs spéléo utilisent la règle des tiers, selon laquelle le premier tiers de la réserve est utilisée pour la plongée, le deuxième tiers pour la sortie de la grotte ou la remontée, et le dernier tiers est destiné à parer aux imprévus. Cette mesure peut paraître trop stricte pour la plongée en eaux libres, mais l’idée de prévoir une bonne réserve pour les cas d’urgence ou les circonstances inattendues est tout à fait pertinente. Tout manquement dans la gestion du gaz respiratoire met en danger non seulement le plongeur en question, mais également son binôme et le reste de la palanquée.
SE RETROUVER COINCÉ
Se retrouver coincé constitue le deuxième facteur déclenchant le plus fréquent des décès en plongée. Environ 200 plongeurs parmi les décès compilés par DAN, soit 21 %, se sont retrouvés coincés dans un environnement fermé et ont été incapables d’en sortir. Un environnement fermé désigne tout endroit depuis lequel un plongeur ne dispose pas d’un accès direct et vertical vers la surface, comme cela peut être le cas d’une grotte, une caverne, une épave ou de la plongée sous glace. Les organismes de formation avertissent toujours les plongeurs des dangers que représentent de tels environnements sans une formation, une expérience, une planification et un équipement appropriés. En d’autres termes, afin de mitiger le risque, ne vous aventurez pas dans de tels environnements si vous n’êtes pas suffisamment qualifié et préparé. En cas de doute, évitez ces endroits.
PROBLÈMES LIÉS À L'ÉQUIPEMENT
Les problèmes liés à l’équipement constituent le troisième facteur déclenchant le plus fréquent identifié dans l’analyse des décès en plongée. Ils représentent environ 15 %, soit 150 cas, parmi les décès étudiés. Il ne s’agit toutefois généralement pas de problèmes de défaillance de l’équipement ou de conception déficiente. Le plus souvent, le problème réside dans une erreur du plongeur, par exemple un usage inapproprié, l’oubli de vérifier la configuration du matériel, le manque d’entretien ou encore une mauvaise connaissance de l’équipement. Selon le Dr George Harpur, fort d’une longue expérience de l'analyse des décès en plongée, « nous n'avons pu documenter aucun cas dans lequel une défaillance de l'équipement ait provoqué directement un accident de plongée, mortel ou non. C’est la réaction du plongeur au problème qui a causé la pathologie ». Il est important de garder à l’esprit que l’équipement de plongée est ce qui maintient les plongeurs en vie. Il est dès lors essentiel de connaître toutes ses caractéristiques et fonctions, de s’entraîner à son utilisation et de l'entretenir correctement. Prenez soin de votre matériel afin qu'il prenne soin de vous.
Connaître les facteurs pouvant entraîner les plongeurs dans des situations graves ne suffit toutefois pas. Afin d’améliorer la sécurité de la plongée, il convient d’appliquer les leçons pouvant être tirées de ces événements tragiques. Comment pouvons-nous, en tant que plongeurs, réduire la probabilité que de tels facteurs déclenchants nous placent dans des situations difficiles ?
FORMATION
Tirez un apprentissage de chaque occasion qui se présente. Lisez les magazines de plongée, passez du temps avec des plongeurs expérimentés, participez aux réunions du club de plongée, ainsi qu’aux conférences sur la sécurité de la plongée ou aux séminaires en ligne. Les plongeurs plus chevronnés plongent généralement de manière plus sûre. Formez-vous pour le type de plongée que vous souhaitez réaliser, et poursuivez votre apprentissage en dehors de la classe – traitez chaque plongée comme une expérience pédagogique. Prenez tout incident inattendu survenant pendant une plongée comme une occasion pour réfléchir et discuter des différentes réactions, conséquences et stratégies de prévention possibles avec vos compagnons de plongée.
ENTRAÎNEMENT
Les compétences en matière de plongée et de gestion des urgences requièrent un entraînement et une mise à niveau des connaissances constants. Rafraîchissez vos connaissances régulièrement, en particulier si vous n’avez plus plongé depuis un moment. Prenez le temps de vous familiariser avec tout nouvel équipement dans un environnement contrôlé avant de l’utiliser en eaux libres. Même si l’entraînement ne réduira pas le risque à zéro, il vous aidera à prendre les bonnes décisions et à gérer les problèmes de manière appropriée plutôt que de remonter en panique à la surface.
EXPÉRIENCE
On n’insistera jamais trop sur la valeur que revêt l’expérience. Les plongeurs ayant une expérience limitée ou qui reprennent le sport après une longue période d’arrêt se trouvent devant un risque plus important. Selon les données relatives aux décès en plongée consignées par DAN, 88 % des plongeurs ont trouvé la mort lors de la première plongée d’une série. Rappelons que le nombre de plongées inscrites dans le carnet ou la date de certification ne qualifient pas nécessairement un plongeur pour faire face à des conditions de plongée plus difficiles. Afin d’être préparé pour des plongées d’un niveau plus avancé, la complexité et l’effort doivent être augmentés lentement et de façon méthodique au fil des plongées. Élargissez vos horizons progressivement en vous assurant de ne pas dépasser le niveau de difficulté pour lequel vous êtes formé ni d'outrepasser votre zone de confort. La certification n’est pas synonyme de compétence. Ne plongez pas en fonction de votre brevet, mais en fonction votre niveau d’expérience.
SANTÉ
Environ un quart des décès étudiés étaient liés à des problèmes cardiaques. On a pu constater avec surprise que dans 60 % des cas impliquant un trouble cardiaque, les plongeurs présentaient des symptômes tels que l’essoufflement, des douleurs thoraciques ou encore un état d’épuisement avant la plongée, mais ont tout de même décidé de s’immerger. La plupart des plongeurs sont conscients de l’importance d’une bonne santé générale et d’une condition physique appropriée, mais le confort et le bien-être au moment de la plongée sont tout aussi importants. Si vous ne ressentez pas l’envie de plonger, ne plongez pas et voyez comment vous vous sentez plus tard.
La majorité de ces cas cardiaques étaient associés avec une pathologie préexistante ou avec un âge supérieur à 40 ans. Un examen médical annuel est conseillé pour toute personne de plus de 35 ans, plongeur ou non. Un tel examen est également recommandé à la suite de tout changement de l’état de santé. Les plongeurs auront éventuellement intérêt à se tourner vers un médecin spécialisé dans la médecine de la plongée. Si vous ne connaissez pas de médecin possédant des connaissances en médecine de la plongée dans votre région, envoie un email à DAN: [email protected].
PRÉPARATION PRÉALABLE À LA PLONGÉE
Lorsque vous vous préparez pour plonger, il est bon que vous configuriez et assembliez votre équipement avec votre binôme afin d’identifier toute configuration erronée ou étrange. Cela vous permet en outre de vous familiariser avec l’équipement de chacun. En cas de plongée depuis un bateau, il peut s’avérer plus aisé de configurer votre équipement avant que le bateau ne quitte le port. Ceci s’applique tout particulièrement si vous êtes sujet au mal de mer, car vous passerez ainsi moins de temps sur le pont qui tangue. L’assemblage de l’équipement à la hâte sur une mer houleuse et en proie à la nausée augmente le risque d’erreurs potentiellement dangereuses.
Avant la plongée, passez en revue le plan de la plongée avec votre binôme afin de vous assurer que vous êtes d’accord sur l’objectif fixé. Vous devrez également vous accorder sur l’itinéraire et sur les éventuelles alternatives au plan initial. Il est bien plus facile de communiquer le passage au plan B si vous en avez parlé avant l’immersion. Établissez que chacun peut interrompre une plongée à tout moment et pour toute raison, même avant le début de la plongée, sans que cela n’aie de répercussion. La création d’un environnement de confiance où le plongeur ne craint pas de prendre de telles décisions aide à définir un climat de sécurité.
Développez un « rituel pré-plongée » et n’ayez de cesse de le renforcer. Celui-ci doit inclure une vérification de l’équipement et un passage en revue du plan de plongée, des signes de plongée, du protocole en cas de séparation des plongeurs de la palanquée et de la procédure en cas de manque de gaz respiratoire. Bien qu’il puisse sembler inutile si vous plongez régulièrement avec les mêmes personnes, ce rituel est du temps bien investi s’il augmente votre assurance et votre préparation à la plongée. Il est hautement recommandé de s’aider d’une liste de contrôle pour l’accomplissement de ce rituel. Ne dites jamais : « N’ayez crainte, je m’occuperai de vous ». Cela signifie que le plongeur auquel vous vous adressez n’est pas suffisamment qualifié ou préparé pour la plongée… une formule qui conduit indéniablement à la catastrophe. Toute personne s’apprêtant à plonger ne doit le faire que si elle est entièrement préparée et si elle en a réellement envie, et non parce qu’elle y est incitée par quelqu’un d’autre.
LA PLONGÉE
Une fois sous l'eau, examinez-vous mutuellement afin de vérifier que l'équipement est bien fixé et en place, qu'il n'y a pas de fuites et que la flottabilité est bien calibrée. Après avoir échangé un signe OK, effectuez les procédures de préparation à l’équilibrage des oreilles et entamez une descente contrôlée. Descendre verticalement le long d’un bout fixe permet d’interrompre la descente plus aisément en cas de besoin et est recommandé en cas de courants. Si vous n’êtes pas certain d’être totalement prêt pour la plongée, faites un bref arrêt entre 4 et 6 mètres de profondeur pour échanger un signe OK avant de continuer vers le fond. Restez pleinement conscient de votre environnement pendant toute la durée de la plongée, et sachez l’interrompre en cas de besoin. L’approche la plus sage est de planifier votre plongée et de respecter votre plan, mais ce plan peut être modifié si les conditions requièrent plus de prudence. Si vous faites un plus grand effort que prévu pendant une plongée, il est souhaitable de vérifier votre consommation d’air plus régulièrement et éventuellement de réduire votre temps au fond.
Lors de vos déplacements sous l’eau, votre vitesse doit être calquée sur celle du plongeur le plus lent de la palanquée. Il ne faut jamais supposer qu’un autre plongeur pourra suivre votre rythme. Si une plongée de loisir commence à vous sembler fatigante, ralentissez ; il se peut que vous ou un membre de votre palanquée ne respectiez pas toutes les consignes. Si vous plongez à trois et que l’un des plongeurs décide de remonter à la surface, soit toute la palanquée interrompt la plongée, soit vous escortez le plongeur jusqu'à la sortie et vous vous assurez qu'il soit bien sorti de l'eau avant de poursuivre votre plongée.
Cette analyse des décès en plongée indique-t-elle que la plongée de loisir présente des dangers inhérents ? Non. Il existe des millions de plongeurs certifiés qui ont réalisé des dizaines de millions de plongées agréables sans incident. Mais considérez que toute activité comporte un risque. Le risque auquel nous nous soumettons en tant que plongeurs est-il démesuré ? Je suis convaincu que la réponse est non. La plongée en scaphandre sera toujours associée à un certain niveau de risque, mais il s’agit d’un risque identifiable et que l’on peut apprendre à gérer.
La plongée est un sport fabuleux apprécié par les jeunes et les moins jeunes. L’objectif devrait toujours consister à maximiser le plaisir tout en minimisant le risque. Il est possible de surmonter les difficultés sous l’eau grâce à une bonne préparation, à une forme physique adéquate et à l’application efficace des connaissances et compétences acquises.